Profession du père
Grasset, 2015
Emile a douze ans en avril 1961, au moment du putsch des généraux à Alger. Il est fils unique et habite à Lyon avec ses parents. Sa mère est une femme soumise et travailleuse. Son père est… et bien là est toute la question. En fonction des opportunités, il se présente comme chanteur, footballer, judoka ou pasteur. Mais son métier qu’il aime le plus mettre en avant auprès de son fils en lui imposant le secret le plus absolu, c’est celui d’espion. Et en tant que tel, il a un grand objectif : rétablir l’Algérie française et tuer le Général de Gaulle.
Sorj Chalandon offre dans ce roman un portrait glaçant d’une famille française de l’époque. Pas représentative, espérons-le. Le père, la main leste, règne en maître absolu sur ses proches. Son comportement oscille entre la violence extrême et la folie. L’enfant, terrorisé, tente pourtant tout ce qu’il peut pour plaire à ce papa qu’il admire et qu’il copie. Le couple est replié sur lui-même, sans amis, sans parents. Personne ne soupçonne la détresse du fils, pas même lorsque les murs du collège se couvrent de graffitis glorifiant l’OAS et ses rebelles.
A l’aide de phrases courtes et sans fioritures, Sorj Chalandon nous émeut jusqu’aux larmes. Peu de descriptions, ou alors juste celles qu’il faut pour placer les personnages dans leur contexte. Pourtant, tout y est, décor et ambiance, jusqu’à la poussière sur les meubles défraichis, le crissement de la craie sur le tableau noir, la folie du père et sa pâle imitation par le fils. Sobriété et précision. Rien que pour son style, ce roman est un régal.
Profession du père est le premier roman de Sorj Chalandon que je lis. Il n’est heureusement pas trop tard pour poursuivre ma découverte de son univers littéraire.
Un extrait. Le père commente le discours du Général de Gaulle le lendemain du putsch.
Le jour tombait. A chaque phrase du Général, il lui répondait en grondant.
« Leur entreprise ne peut conduire qu’à un désastre national. »
– C’est toi le désastre, connard !
« Au nom de la France, j’ordonne que tous les moyens, je dis tous les moyens, soient employés partout pour barrer la route à ces hommes-là, en attendant de les réduire. »
– C’est toi qu’on va réduire ! Tu es mort, mon salaud !
Mon père s’est levé. « Partisans, ambitieux et fanatiques. » Il marchait dans le salon en faisant des gestes brusques. « L’aventure odieuse et stupide des insurgés. » Il se raclait la gorge, remontait son pantalon, claquait ses mules sur le parquet. « Le malheur qui plane sur la patrie. » Il ricanait.
– Non, mais tu l’entends, cette ordure ? Tu l’entends ?
Ma mère hochait la tête. Elle avait le visage des soirs de bulletins scolaires. Lorsque nous attendions mon père, encombrés de mes mauvaises notes.
Il fait parti des livres que je veux lire. Je vais bien y arriver !
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Ce serait trop facile et beaucoup moins drôle, si nous nous répartissions nos lectures pour gagner du temps. Un peu tordu, en fait (voilà, je l’ai casé!!!). Bonne (future) lecture !!
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Hey bien casé d’ailleurs 😜
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J’ai trouvé ce livre extrêmement touchant. Il est en partie autobiographique. J’ai rencontré l’auteur lors d’une soirée débat dans une librairie, il avait parfois les larmes aux yeux et c’était très émouvant. J’avais beaucoup aimé « Mon traître » et « Retour à Killybegs ». Moi, j’ai en attente de lecture « Le petit Bonzi » et « Le quatrième mur ».
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Je vais faire l’acquisition du Quatrième mur sans faute. Au moins celui-là… Le petit Bonzi, c’est de lui aussi ?
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Oui c’est de lui aussi mais pas encore lu. Chacun de ses livres ont une part autobiographique.
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