L’enfant dans la Tamise
Belfond, 2015
Cœurs sensibles, ne vous abstenez pas de lire L’enfant dans la Tamise, ce serait trop dommage de vous priver de ce livre magnifique. Mais sachez à quoi vous vous exposerez. Ce documentaire vous précipitera dans les horreurs de meurtres rituels d’enfants au cœur du Londres d’aujourd’hui. Ce n’est pas sans nausées que j’ai lu ce livre douloureux.
Richard Hoskins est professeur. Il enseignait les religions africaines à l’université de Bath, en 2002, lorsqu’il a été contacté pour la première fois par Scotland Yard pour aider la police à élucider un meurtre atroce, celui d’un enfant retrouvé dans la Tamise, sans tête et démembré. Un torse. Ce jour-là, la vie du tranquille universitaire bascule. D’enseignant, il devient expert en criminologie spécialisé dans les actes de torture et les assassinats perpétrés sur des enfants au nom de religions africaines. Hélas, la Grande Bretagne a besoin de tels experts.
La plume de l’auteur est tellement fluide qu’à de nombreuses reprises, je me suis surprise, moi qui en général n’aime pas les polars, à croire que j’en avais un entre les mains, et un bon, en plus. Quelle ironie… Et lorsque l’horreur des évènements, la profusion des détails légistes et la narration bibliographique m’ont ramenée à la triste réalité, loin d’interrompre ma lecture pour respirer comme j’aurais pu si le livre avait été trop académique, je n’ai eu de cesse de la poursuivre pour voir les salauds arrêtés et les enfants sauvés.
Ouf…
Richard Hoskins témoigne dans ce documentaire avec un courage exemplaire. Dans l’objectif de dénoncer la radicalisation des églises chrétiennes en Afrique de l’Ouest et la perversion de leurs branches européennes, il s’oppose à des sectes richissimes. La médiatisation des affaires criminelles, à laquelle il a pris une large part, devrait certes ouvrir les yeux des immigrés en provenance d’Afrique sur les dérives de leurs gourous, mais le risque d’amalgame est grand. Il ne se prive pas de le dire, d’ailleurs, lors des différents procès où il témoigne, afin que les jurés ne tombent pas dans le piège.
Amalgame ? Ne pas confondre les religions et leur radicalisation. Les évènements relatés dans L’enfant dans la Tamise se passent à Londres et aujourd’hui. Des actes perpétrés au nom de rituels religieux, mais qui n’ont plus rien de religieux. La chrétienne Afrique de l’Ouest, si chère au cœur de Richard Hoskins, ne doit pas souffrir de la barbarie menée par des mouvements extrémistes. Un message facile à transposer à d’autres amalgames, en ces périodes incertaines, n’est-ce pas ?
J’ai lu L’enfant dans la Tamise dans le cadre du Grand prix des lectrices ELLE 2016 et remercie profondément les organisateurs du prix de m’avoir permis de découvrir ce documentaire bouleversant.